INDUSTRIE ET CHANGEMENT CLIMATIQUE
L’association des deux mots a longtemps fait sourire tant dans l’imaginaire collectif le gap entre les deux notions est immense. Cependant, force est de constater que depuis plusieurs années les entreprises ne sont pas forcément à la traine en terme de transition et d’adaptation au changement climatique.
Ce changement s’explique de nombreuses façons.
Déjà parce que les chefs d’entreprises, les responsables de sites, les chargés de missions sont aussi des citoyens qui s’engagent pleinement pour le futur, leur futur et celui de leurs proches… Il est donc normal que leurs approches en faveur de la transition se retrouvent également dans leurs pratiques quotidiennes au travail et dans leurs entreprises. La crise que nous traversons actuellement ne devrait pas inverser la tendance, même si le risque d’effondrement de l’économie est palpable.
Au centre de cette réflexion, la gestion de l’eau est depuis trois ans en pleine mutation dans les entreprises des Hauts de France. Les restrictions à répétition des usages pour les professionnels, l’augmentation régulière du prix du m3, les nécessaires évolutions réglementaires font que les réflexions économiques entrent en résonnance avec les préoccupations environnementales. Et on a tous à y gagner !
Loin de se plaindre du contexte actuel, de nombreuses industries ont pris le temps de réfléchir à une nouvelle utilisation de l’eau au sein de leur structure. Ou quand économie rime avec écologie…
La CCI Hauts de France, porteuse des dynamiques REV3 (avec le Conseil Régional Hauts de France) et AquaPRIS, vous propose un tour d’horizons d’entreprises engagées dans cette transformation de leur modèle.
Cette première étape nous amène dans le département de l’Aisne, plus précisément à Neuville-Saint-Amand, à la rencontre de l’entreprise Fusiocast.
L’entreprise est une fonderie d’aluminium sous pression. Elle réalise des pièces pour tout secteurs d’activités des plus petites séries (100pièces) jusqu’aux plus importantes (20000 pièces). Pour réussir ce pari, le gérant met le client au cœur de l’entreprise et c’est cette proximité qui favorise le dialogue et donc les performances.
L’entreprise en quelques chiffres : 16 personnes pour 6 presses à injections entre 100 et 900 tonnes, un atelier de finition intégré sur le site de la fonderie et des clients partout en Europe.
Le point de départ de la réflexion du gérant est arrivé à la réception de sa première facture d’eau, de beaucoup plus importante que les moyennes enregistrées dans le secteur de la fonderie. Ce constat, au-delà de la mauvaise surprise, a conduit le gérant, Francis Radel, à se questionner sur son impact environnemental : « Avoir conscience de notre impact environnemental est une vraie force pour l’entreprise et un vrai levier d’action pour rendre l’entreprise à la fois plus respectueuse et plus compétitive. »
Après ce premier constat, le chef d’entreprise a donc fait le point de toutes ses consommations pour en mesurer les contraintes et les possibilités de changements. Parmi les premières pistes de réflexions, travailler sur le système de refroidissement des pièces a rapidement été une évidence. Jusqu’à présent il était en circuit ouvert, mais rapidement s’est imposée la solution de la mise en œuvre d’un circuit fermé. Techniquement et qualitativement possible, l’opération a été enclenchée sans délais, pour un résultat rapide et efficace.
Fort de cette première expérience réussie le gérant a étendu la réflexion à l’ensemble de l’atelier avec, par exemple, la pose de systèmes hydro-économes. Côté achats du matériel, la consommation d’eau a été un critère de choix. Les nouvelles machines de finition des pièces (tribofinition) ont également été choisies en fonction de leurs caractéristiques de consommation en eau. Et l’installation a même été couplée avec de la récupération d’eau de pluie pour les appoints machines.
Résultat : Une baisse de consommation de près de 90%. La consommation réelle est ainsi passé de 14m3 par jour de production à 1.4m3. Cette baisse a même conduit les services de l’Agglomération à contacter l’entreprise pour savoir si l’activité était encore opérationnelle sourit le gérant. Au-delà de la boutade, il constate « Réaliser des économies d’eau nous a permis d’être plus performante et de travailler sur des marchés jusqu’alors impénétrable ».
Même si l’eau n’est, à priori, pas le flux le plus impactant pour une fonderie, il n’en reste pas moins intéressant et opérationnellement facile à mettre en œuvre. L’agence de l’eau Artois-Picardie est d’ailleurs largement partenaire des entreprises de son bassin versant comme elle a pu le faire en accompagnant l’entreprise Fusiocast dans son investissement ! En subventionnant une partie de l’investissement machine, l’entreprise se sent soutenue et permet de faciliter le passage à l’acte tout en préservant la ressource pour l’avenir.
Auteur : Michaël Verdier, Chargé de projets Développement Durable pour REV3 AquaPRIS.